Maroc Telecom : l’entreprise veut garder la tête froide

Depuis quelques semaines, l’agressivité des grévistes de Maroc Telecom monte en puissance dans le royaume Chérifien, avec notamment une radicalisation des attaques visant les instances dirigeantes du groupe, sur fond de contestations issues du « printemps arabe ». Refusant de céder à la pression grandissante, le top management de l’entreprise estime avoir configuré correctement la réponse à travers une batterie de mesures adoptées la semaine dernière. Néanmoins, l’on constate une recrudescence de l’activisme des principales mouvances syndicales mais aussi de mouvements nés sur Internet, qui se livrent désormais à une compétition avec les centrales présentes au sein de l’opérateur dans le but manœuvré de déstabiliser le groupe.

« Nous considérons que ce sont des coups en dessous la ceinture » nous confie ce responsable de l’opérateur Marocain, à propos des attaques personnelles dirigées notamment à l’encontre de Vivendi et du Président de Maroc Telecom, Abdeslam Ahizoune, par des groupuscules qui appellent à une grève de 4 jours depuis le lundi 27 juin. En effet, pour l’opérateur historique du royaume chérifien et leader national économique de ce pays, les responsables syndicaux ont franchi la « ligne rouge » en s’attaquant désormais au Président du groupe, dans une tentative claire d’affaiblir son leadership sur fond de revendications qui semblent très politisées. Cette campagne, selon certains experts en  télécoms, pourrait même avoir l’effet inverse en raidissant notamment l’actionnaire français de Maroc Telecom, le groupe Vivendi. D’un point de vue tactique, il n’est pas exclu que les mouvements syndicaux, qui ont obtenu des avancées très significatives de la part de la direction la semaine dernière (notamment une augmentation des salaires de 1000 DH, un accès à la propriété à prix réduit  de 10%, ou encore la reprise d’un programme de promotion interne), soient eux même poussés à la surenchère par une base vindicative et très revendicatrice, qui aimerait savoir jusqu’où elle peut pousser son avantage. Néanmoins, les analystes financiers sont déjà en train de tirer la sonnette d’alarme sur le coût éventuel de cadeaux sociaux plus importants en terme de rentabilité de l’entreprise, qui est à la fois cotée en bourse à Casablanca et sur Euronext, mais qui constitue aussi l’un des tous premiers contributeurs au budget de l’Etat marocain, aux côtés de l’Office Chérifien des Phosphates (OCP).  En effet, pas sûr que Maroc Telecom puisse garder sa profitabilité ainsi que son attractivité en bourse si l’entreprise venait à dépasser un certain seuil en termes de coûts fixes, surtout que l’entreprise a près de 11 000 employés. Ainsi, les analystes estiment que si un retournement de conjoncture intervenait, où si l’un des pays africains où Maroc Telecom est présente venait à connaître des difficultés qui s’installent dans la durée, l’on pourrait être en présence d ‘un scénario qui se retournerait complètement contre le mouvement syndical actuel. Selon plusieurs sources dignes de foi, la direction de Maroc Telecom refuserait de se livrer à une « personnalisation » du débat, car, estime-t-elle, « ce sont les leaders syndicaux qui auraient le plus à perdre… ». En effet, parmi les revendications de certains groupes syndicaux, l’on note une bien curieuse « renationalisation » de l’entreprise, qui conduirait dans les faits l’entreprise vers un net recul social si les salaires devaient être à nouveau réindexés sur la fonction publique. Les prochains jours seront donc déterminants afin d’évaluer la mobilisation des groupes syndicaux et leur sens de la responsabilité pour tenter de re-canaliser les revendications vers  une plate-forme raisonnable.