Togo : Wikileaks accuse Kpatcha Gnassingbé

Dans la guerre judiciaire qui oppose l’ancien ministre de la défense, Kpatcha Gnassingbé, à son frère Faure, Président de la République du Togo, deux câbles diplomatiques « Wikileaks » du département d’état US, rédigés de la main de l’ambassadeur américain à Lomé Patricia Hawkins, pourraient jouer un rôle particulièrement déterminant pour permettre d’éclairer les dessous de cette sombre affaire. En effet, depuis le mardi 6 Septembre, le procès pour « atteinte à la sûreté de l’état » a en effet repris à Lomé, et déchaîne les passions puisque le principal accusé, Kpatcha Gnassingbé, serait en partie revenu sur ses aveux précédents qu’il se préparait à renverser son frère en avril 2009. Or, dès le 13 avril 2009, l’ambassadeur américain Patricia Hawkins, révèle dans un message portant le code 09LOME115 et classé « Confidentiel » que « les rumeurs de coup d’Etat circulent dans Lomé depuis plusieurs semaines». Pour bien comprendre ce qui se trame à ce moment , il faut rappeler que la veille au soir, le 12, les services de sécurité togolais ont procédé à l’arrestation de Kpatcha Gnassingbé, ancien ministre de la défense et demi-frère du Président, immédiatement reconnaissable de part sa carrure imposante.

Le colosse de près de deux cent kilos, avec l’aide de l’un de ses autres frères, Rock Gnassingbé, arrive ensuite à se soustraire à la surveillance des forces de police togolaises durant la nuit, avant d’être arrêté à nouveau la matinée suivante. Evoquant une entrevue secrète entre les services de l’ambassade américaine et les patrons des services de sécurité togolais durant le week-end du 12 avril, l’ambassadeur américain affirme que les autorités togolaises avaient probablement eu vent de la « tentative de coup ». L’ambassadeur Hawkins affirme ensuite que « conformément à notre conviction que cela (l’arrestation de Kpatcha Gnassingbé) était une tentative de prévenir un coup d’Etat, quatre militaires ont été arrêtés, dont un certain capitaine Gnassingbé, un cousin. ». L’ambassadeur américain se demande à cet égard, pourquoi Kpatcha Gnassingbé aurait « éloigné précipitamment sa famille de Lomé ce week-end du 12 avril ». Un autre câble diplomatique, daté du 16 avril 2009, est encore plus accablant pour l’ancien ministre de la défense Togolais , puisque les autorités américaines y affirment que « la découverte d’uniformes de police (par les services de sécurité) indique un degré de préparation plus élaboré que ce que nous pensions. L’information selon laquelle Kpatcha aurait versé autant d’argent (NDLR : près d’un million de $ à ses co-conspirateurs) pose encore une fois la question de son implication dans le trafic de drogue, car il est difficile d’imaginer comment il aurait pu se procurer autant de cash ».

Ces accusations des services de l’oncle Sam quant à une implication de Kpatcha Gnassingbé dans le trafic de drogue viendraient en partie expliquer le mobile derrière la tentative de coup d’Etat. Allié fortement aux américains depuis son élection en 2005, le Président Faure Gnassingbé a été contraint de prouver qu’il lutterait effectivement contre le trafic de drogue, en contrepartie d’une aide américaine substantielle. Ceci serait venu contrarier les plans de Kpatcha Gnassingbé, qui sera d’ailleurs écarté du très stratégique ministère de la défense en 2007, pour redevenir simple député.