Maroc : chronique d’une mort annoncée du M20

20fevrierAu Maroc, le Mouvement du 20 Février appartient aujourd’hui au passé. Pourtant, ce projet lancé par des jeunes assoiffés de liberté il y a deux années, au plus fort des révoltes arabes, a permis de révéler bien des facettes de la société marocaine.

En premier lieu, l’apprentissage de la contestation pacifique. De nombreux observateurs avaient fait la remarque du caractère pacifique des marches qui s’étaient déroulées les dimanches, avant de perdre de verve et de régularité. Les manifestants, tout en brandissant des revendications de démocratisation et de lutte contre la corruption, avaient fait preuve d’un sens civique frappant. Ce qui n’était pas le moindre contraste avec les images diffusées par les chaînes satellitaires internationales. Alors que les écrans déballaient le désordre et la destruction en cours dans les pays arabes en proie aux troubles, les images provenant du Maroc montraient des manifestations ordonnées, où les marcheurs faisaient preuve d’une forte exigence de discipline. Pas de casse dans la rue, ni de démolition ou dégradation des biens publics ou privés. Une attitude qui a eu pour corollaire une retenue tout aussi remarquable des forces de sécurité, lesquelles encadraient les marcheurs avec un air souvent détendu, voire débonnaire. Un calme qui dénote d’ailleurs une rupture avec la fébrilité du passé et les réactions disproportionnées.

L’autre remarque à tirer de ces manifestations pour la démocratie et les réformes, c’est que la liberté d’expression n’est pas un vain mot. La tolérance et le respect des opinions divergentes sont réels au Maroc, bien qu’ils soient relatifs dans un contexte arabe où les clivages idéologiques et les discordes religieuses sont la règle. Enfin, la pluralité politique et sociétale au Maroc a été également mise en évidence. Tout au long des manifestations revendicatives qui se sont déroulées durant la première moitié de 2011, on était en présence d’un tableau contrasté. Des marcheurs qui manifestaient pour le changement avec, en face, d’autres citoyens qui les regardaient déambuler sans toutefois leur contester leur droit à s’exprimer librement.

Finalement, le mouvement du 20 Février a été rapidement court-circuité par les réformes politiques et institutionnelles introduites par la Constitution de juillet 2011. Des réformes qui ont également porté au pouvoir des islamistes modérés. Mais contrairement à d’autres pays arabes où la montée des islamistes a embrasé la situation politique et sociale, le PJD s’est rapidement inscrit dans le continuum institutionnel marocain même s’il reste encore du chemin sur la voie des réformes et de la modernisation de la société.